C'est un gros bonheur d'être à 2 sur notre bécane, nous prenons de la distance avec Dushanbe, les paysages sont verts et de la petite montagne arrive, il fait trop beau. La route est nickel sur au début le premier jour, et cela devient rapidement de la piste. Nous nous enfonçons dans les montagnes, traversées de torrents, 2 motards italiens sont dans le coin. Nous leur filons un coup de main quand ils se cassent la gueule, c'est un sketch à chaque fois. Sinon, il n'y a pas grand monde sur la route, quasi personne même. Un Kamaz nous dépanne d'un peu d'huile de boite de vitesse.

La moto marche au top. Juste des petits soucis électrique, comme si la batterie ne rechargeait pas, nous finissons d'ailleurs une nuit à la frontale. Un gros passage de rivière à pousser la bécane, les affaires déchargées. Puis la montée au col à 3258m, les doigts dans le pif. Arrivée sur Kalaikhum assez folklo, à fond de première ou de seconde, dans la descente du col, la batterie ne donnant quasi rien.

Kalaikhum, un bled avec l'Afghanistan en face. Nous sommes dans une superbe vallée, celle de la rivière Pyandzh qui arrive tout droit de Khorog, prochaine étape. Ok, nous restons un peu sur place: batterie qui se recharge chez un gars la nuit, démontage de l'alternateur le lendemain, relais électrique ? Ouais bon, le problème viendrait de ce foutu relais qui marcherait quand il veut. Pas moyen d'en trouver un autre, mais avec la batterie rechargée à bloc nous décidons de continuer comme ça, même avec cet ostie de voyant rouge qui fait dire à tout le monde que ce n'est pas bon. Bref, cela marchera comme sur des roulettes pour la suite...

Deuxième étape : Kalaikhum-Khorog, 300kms, 2 jours

Nous voila sur une route que je connais déjà pour y être passé fin mars. Plus aucune avalanche de neige qui pourrait bloquer le passage. Nous longeons la rivière - frontière, toujours temps de dingue, passage par des petits villages excellents. Vite, au taquet pour rattraper un ZIL (le camion des Pamirs...) et lui taxer 15 litres de benzine avant de tomber en panne. Mais avec un réservoir de quasi 20 litres et quelques bidons de 5 litres, nous n'avons en général pas de problème de "plus une goutte d'essence".

Khorog, ville principale de la région GBAO, région plus ou moins indépendante au sein du pays (mais l'aide de Dushanbe est indispensable). Sur place, nous gérons quelques bricoles, notamment changement de roue à l'arrière. Nous avions du jeu sur l'axe, les rayons sautant les uns après les autres, pas bon ça : en jouant avec quelques rondelles, en mettant la roue du side à l'arrière, nous serons bon pour continuer.

La suite ? droit sur Murghab, par la route principale. Nous laissons tomber l'idée du couloir de Wakhan au sud, la moto étant trop incertaine, on verra ça plus tard.

3eme et dernière étape : Khorog-Murghab, 305kms, 3 jours

Nous quittons la frontière afghane, route qui s'enfonce dans une vallée, en direction des plateaux du Pamir. Temps magnifique, des sommets enneigés, un match de volley, le bonjour à des familles que je connais. Arrêt à Jelandy et ses sources d'eau chaude : calés dans le bassin, dodo sur place, il neige un peu pendant la nuit.

Nous sommes 15 bornes avant le col à 4200m qui marque un peu l'entrée sur les plateaux. Et la moto qui merde, un beau bruit dans le moteur, plus au niveau de la boite vitesse même. Aie aie aie, nous n'allons pas tomber le moteur maintenant au milieu de rien, et en première ça va bien. Nous avançons donc comme cela, pour voir...

Arrêt avant le col à la baraque d'entretien de la route, le temps se gâte, orageux en face, il se met à neiger. Nous attendons un peu, moment sympa avec la famille qui vit ici. Et voila un ZIL qui débarque : Ok banco, nous négocions avec les gars, 50 somonis (15 dollars), et nous chargeons la moto au milieu des sacs de laine de mouton et de fourrures, et transport jusqu'a Alichur, 60-70kms.

Grosse ambiance : tous les 2 avec 4 autres gars dans la benne du camion, sous des couvertures. Ils sont déjà 5 dans la cabine. Montée au col sous la neige, il fait froid. La piste est plutôt merdique à ce niveau, surtout avec la flotte. Beaucoup de roue libre ensuite, au taquet, nous voila sur les plateaux, changement d'ambiance.

Alichur, 3800m, petit bled avec pas grand chose autour. Nous sommes accueillis dans une famille, bien au chaud, super bouffe, le bonheur. Le lendemain, un peu galère pour démarrer la bécane, nous poussons pas mal, les gars du village avec nous. Et un peu partout c'est comme cela: beaucoup de véhicules en panne, ça bricole dessus, atmosphère de rien qui marche… mais avec les moyens du bord, ça finit toujours par fonctionner, un jour ou l'autre quoi.

Nous avons une deuxième batterie avec nous, achetée à Khorog, et c'est clair que tout le monde veut nous l'acheter. Nous la laisserons à la famille. Carburateur droit : le joint rend l'âme. Hop tac tac, découpage d'un nouveau joint dans un morceau de tapisserie, un peu de pâte, et cela ira pour continuer. Ok, la moto tourne rond à présent, plus de bruit qui fâche, c'est extraordinaire la mécanique quand même.

Fsio, il reste 100 kilomètres jusqu'à Murghab, la route est asphaltée, ça avance tout droit. Des troupeaux de yaks dans les champs, le temps s'est un peu amélioré. Nous arrivons sur Murghab. Il y a 2 mois, je m'étais imaginé revenir ici avec Axel, en side-car, et voila que nous y sommes. Arrivée grandiose dans le bled, sous une averse de grêle !

Nous retrouvons la famille de Turat et Suun, où j'étais resté. Et c'est super intéressant de revenir à un même endroit, dans des circonstances différentes. C'est donc notre famille sur Murghab.

Les sources d'eau chaude de Madiyan, bien connu dans le coin, se trouvent à 40kms de Murghab. Nous faisons l'aller-retour, avec un super temps. Km 12, plantage de la bécane dans un petit cours d'eau terreux : nous passons plus de 2 heures pour sortir la machine. Et c'est cool d'avoir avec nous les pelles pour avalanches en montagne.

Les sources d'eau chaude : un petit coin de paradis avec quelques yourtes, les fameuses tentes kirghizes. Nous sommes seuls avec la femme qui s'en occupe et ses 3 enfants. Bassin trop excellent, eau trop bonne, on nous fait une bonne bouffe... tabarnak nous profitons du moment.

Retour sur Murghab, et le plan est : vente de la moto. Snif snif... J'avais de mon coté émis l'hypothèse de la garder, de la stocker au Tadjikistan et de revenir la chercher un jour pour la ramener en France. Mais bon, pas si évident, trop incertain de la suite de ma vie, et puis c'est mieux que la bécane tourne ici. Si cette idée prend forme un jour, j'en trouverai toujours une autre.

Ok, j'avais le contact d'un ou 2 gars qui étaient partant pour la reprendre, et surtout des gars pas pauvres qui pourraient l'acheter à bon prix pour nous. Mais ils ne sont pas ici en ce moment. Bref, notre idée étant de continuer sur des plans montagnes assez rapidement, nous ne perdons pas de temps : au bazar, attroupement autour de la machine, qui la veut ? à combien ? moi, toi, non t'es sur ? j'ai pas le fric sur moi ? Super moment, ambiance très locale. Allez fsio, banco avec un gars pour un peu plus de 200 dollars !! Et ce n'est pas trop mal de la vendre à ce prix à Murghab. Boum, en 2 temps 3 mouvements, nous nous retrouvons avec tout notre stock d'affaires, à pied.